Qui prend un peu la peine de sortir de son terrier le sait : le genre barbarement surnommé "Metroidvania" ne manque pas de représentants. On pourrait dire qu'ils sont partout. Mais pas toujours au niveau. Alors même s'il nous paraît appétissant au premier abord, il convient de bien observer F.I.S.T., jeu du China Hero Project signé TiGames avant de savoir si c'est un bon lièvre à courir.
Rayton le lapin est bien embêté. Son ami l'ours Urso a été emprisonné. "Sûrement une erreur, je dois discuter avec ses geôliers", se dit-il, avant de prendre la route du bagne. Avec un poing mécanique démesuré sur le dos pour éclater les faces métalliques de la Légion, force robotique qui soumet tous les citoyens à fourrure de Torch City depuis des années. On ne vous a pas dit, mais un léporidé comme héros de l'histoire ne garantit pas qu'il s'agit d'un conte pour enfants. F.I.S.T. : Forged In Shadow Torch raconte une fable sombre, violente. Le cadre est gris, délavé. Les animaux anthropomorphes acteurs d'une intrigue où l'on parle de totalitarisme, de résistance, d'évolution, de sociétés clandestines, de complots, de trahisons, tout ça pour des cristaux mystérieux. Ca tabasse, lourdement, en permanence. On éloignera donc nos chères têtes blondes. Et raison supplémentaire pour ne pas mettre F.I.S.T. (rien à voir non plus avec le film) entre toutes les mains : TiGames propose un Metroidvania 2,5D plutôt dur sur l'homme. Et puis ça tombe bien, de toute façon, le jeu est en anglais et les différents personnages pas vraiment bien écrits ni doublés. Allez hop, devant Pat' Patrouille la marmaille.
Toi aussi, mon FIST
Comme dans tout jeu de ce style consacré avec Super Metroid et Castlevania : Symphony of the Night, vous allez cavaler. À droite, à gauche, dans une zone d'abord restreinte où grouillent des ennemis qui donneront tout pour vous rétamer. Torch City se révèle un lieu particulièrement intéressant sur le plan architectural. Ville Dieselpunk qui ressemble à une Shanghai du milieu du XXème siècle qu'on aurait fusionné avec le Midgar de Final Fantasy VII, elle dévoile au gré de vos recherches des quartiers aux ambiances différentes. Hors de la vieille ville de départ, vous aurez l'occasion de traverser les égouts, un lac souterrain, une centrale électrique, une mine, un quartier plus calme baignant dans des sonorités jazzy... À pieds ou dans l'eau, vous aurez fort à faire pour progresser. D'une part, se dresseront face à vous des pièges variés (plates-formes mouvantes, sol électrifié, et tout le toutim), engageant parfois des situation des puzzles ou de furtivité épineuses. Mais surtout, parfois en même temps que vous tenterez de garder l'équilibre, des adversaires mécaniques dont la ténacité et l'esprit de corps constituent autant un point fort qu'une raison d'enrager.
Haut la main, peau de lapin
C'est un fait, il y a du plaisir à prendre avec F.I.S.T.. On apprécie l'ambiance, le level design vraiment travaillé et piochant chez les meilleurs représentants de l'action-aventure 2D. Le fait que la carte, immense, ait tant de recoins à offrir - rarement pour augmenter sa jauge de vie, zut - et donne les bons renseignements aussi. Les déplacements sont fluides et sans trop d'accrocs. À chaque étape importante, un nouvel accessoire, une compétence, un upgrade ou une arme permet de savoir où se diriger ensuite. Rebond sur les murs, double saut, respiration sous l'eau, propulsion, esquive... Vous connaissez la chanson, reste que le charme agit parce que c'est toujours bien agencé, avec ce qu'il faut de place pour les secrets. Si ceux-ci peuvent d'abord s'obtenir à force de sauts et de poings bien placés, Ray pourra aussi employer une perceuse et un fouet électrique. Les deux se chargeront d'ouvrir certains accès, vous laisseront planer ou vous propulser via des points suspendus. Il offriront aussi une petite variété dans les affrontements, bien entendu fort nombreux. Vous pouvez passer d'une arme à l'autre d'une simple pression sur une touche, y compris en plein combo.
Chaque option présente des avantages et inconvénients en matière de distance d'attaque, de puissance et de vitesse. Et de combos, à acheter dans l'arbre de compétences, avec des cassettes disséminées un peu partout. C'est vous qui déciderez ce qui convient le mieux. Ou plutôt vos adversaires. Parce qu'un légionnaire armé d'une épée lourde ne réagira pas de la même façon à la mimine qu'au martinet du futur. Même chose pour une grenouille ninja. Lorsque vous avez plusieurs ennemis simultanément sur le paletot, en particulier des tirailleurs pouvant vous entraver, surtout dans une pièce exiguë, n'en parlons pas. Vous ne perdrez pas la sensation de puissance, extrêmement satisfaisante. Encore faudra-t-il, même en connaissant enchaînements et patterns, réussir à placer un coup sans se faire juggler jusqu'au perfect tel le premier noob de Tekken venu.
Le redressement fistal
Chose que l'on ne réalise pas forcément dans les premières heures : Ray et le joueur qui le fait bouger ne sont pas très avantagés. Alors que l'on vit une scène de poursuite tout droit sortie d'Ori, quelques bastons générales et duels corsés avec certains boss, l'évidence apparaît. Notre lapinou est plus lent et un peu raide dans ses attaques. Il ne réagit pas toujours très bien à nos sollicitations, la faute des inputs delays et même carrément des refus d'obtempérer. En outre, il n'est pas rare de constater des bugs de collisions à notre désavantage. De fait, il ne faut pas trop s'exposer. D'un côté, cela évite le button mashing décérébré et force à la concentration.
De l'autre, la punition pour un dash estimé tardif s'avère souvent trop violente. Dieu merci, des attaques spéciales consommant une jauge SP vous aident. D'autres items placés sur le stick droit, à usage limité, vous soulagent : régénération, leurre explosif, lance-missile et garde (oui, c'est étrange). Mais, pas réactif non plus pour trois d'entre eux, ils ne suffisent pas forcément à dépasser un léger sentiment d'injustice dans certains cas. On ne citera qu'un dénommé Yokozuna, surpuissant et d'autant plus frustrant à défier qu'il faut se coltiner sa cinématique d'introduction à chaque nouvelle tentative. Il n'est pas le seul. Le placement des points de sauvegardes est un gros caillou dans la godasse, au point qu'il provoquera une infection pouvant décourager les moins patients. Dommage, car le bilan de la quinzaine d'heures nécessaires pour voir le bout (rajoutez-en 5 ou 6 pour tout dénicher) de ce jeu vraiment splendide sur PS5 est plutôt favorable.